Le Directeur Général de la TDA - Algérie dévoile sa vision pour la radiodiffusion africaine, abordant la transformation numérique, les défis éthiques et l'avenir de la 5G lors de la 16e AG de l'UAR
- gaoudairene
- 19 juin
- 4 min de lecture

Nous sommes ici dans le cadre de la 16e Assemblée Générale de l'UAR. Compte tenu des évolutions rapides du paysage médiatique, notamment l'essor du numérique et des plateformes de streaming, quelles sont les principales stratégies de la TDA pour moderniser ses infrastructures et ses services afin de rester compétitive sur le marché africain ?
Un télédiffuseur est face à un défi crucial : sa survie. Son métier est directement impacté par l'émergence des réseaux sociaux, l'obligeant à être présent sur ces nouveaux modes de distribution et de diffusion de contenus.
Ainsi, la pérennité d'un télédiffuseur passe par l'intégration de plateformes interopérables, interconnectées, des services agrégés et une ouverture vers l'international. La TDA a pleinement saisi l'importance de ce message dès l'avènement de ces nouvelles technologies. Elle a donc mené ses études et a transféré toutes ses plateformes de diffusion vers des infrastructures prêtes à diffuser sur un réseau multi-CDN, des Web TV et des services B2B. Il ne reste plus qu'à finaliser les conventions et contrats pour le déploiement définitif de ces nouvelles technologies.
La première phase de la numérisation pour la télévision a été achevée en 2014 par la TDA, avec le déploiement de plus de 660 sites de diffusion. L'Algérie étant un pays très vaste, nous couvrons actuellement 97% de la population. Pour couvrir la totalité des axes routiers, nous devons encore investir et installer davantage d'émetteurs et de centres de diffusion. Pour la radio FM, son audience reste fidèle.
Concernant le numérique, les licences sont désormais systématiquement intégrées aux récepteurs radio mobiles et aux systèmes embarqués dans les véhicules. La TDA a testé plusieurs marques d'émetteurs pendant un an afin de choisir celle offrant la meilleure qualité de service et un système de modulation robuste pour garantir ce service numérique. Avec une seule fréquence, on peut diffuser jusqu'à 18 programmes avec une excellente qualité.
En tant que technicien, vous avez mentionné que les réseaux sociaux sont une menace pour la radiodiffusion. Mais n'y a-t-il pas là également une source d'opportunités ?
C'est une opportunité pour atteindre le consommateur final, mais c'est aussi une source de risque. Avec l'avènement de l'intelligence artificielle, utilisée parfois pour des images à des fins non encadrées, le télédiffuseur est contraint d'implémenter des solutions d'IA pour détecter et nettoyer ces contenus qui prolifèrent sur les réseaux sociaux.
Pour certains pays, cela s'est traduit par la création de leurs propres réseaux sociaux, tels que des "Like YouTube" ou "Like Facebook", afin de maîtriser le contenu. C'est une question de souveraineté nationale, car ces contenus peuvent parfois impacter l'éducation de nos enfants avec des messages décalés qui heurtent nos principes et notre religion. Un réseau social doit donc être contrôlé de près pour éviter tout contenu néfaste à la population.
Quelles sont les initiatives concrètes que la TDA envisage de prendre ou de renforcer avec d'autres radiodiffuseurs africains membres de l'UAR, notamment en termes d'échange de contenus, de formation et de développement technologique ?
La TDA ne produit pas de contenu, mais elle peut en héberger et assure l'archivage et l'enregistrement. Les établissements chargés de la production de contenu audiovisuel en Algérie sont la Radio et la Télévision, le groupement algérien complet étatique, est membre du conseil exécutif. La TDA est prête à aider tous les radiodiffuseurs et à favoriser les échanges technologiques et de savoir-faire.
Nous ne pouvons pas tout savoir ni tout faire. D'autres pays africains sont plus avancés que la TDA dans certains métiers de la diffusion, et d’autres moins. La TDA est donc prête à offrir ses services dans ce domaine.
De plus, la TDA sera, au niveau de la MEDIACITY, l'exploitant de toutes les plateformes et centres de données. Nous pourrions commencer par des serveurs de studios virtuels avec des personnages virtuels, ce qui pourrait remettre en question le métier de journaliste.
Avec l'évolution technologique, les services OTT et les réseaux sociaux, vous serez confrontés à de nouveaux défis. La TDA peut fournir, via des contrats de prestation, des réseaux sociaux, des flux OTT prêts à distribuer et des solutions techniques pour la diffusion TNT satellite.
La TDA, en tant que membre fondateur de l'Union, est toujours prête à contribuer au maximum par son savoir-faire, son matériel technique et toutes ses ressources pour faire progresser l'Union et les télédiffuseurs. L'idéal est que tous soient au même niveau afin d'assurer une interactivité de contenu et de diffusion.
Comment prévoyez-vous l'avenir de la télédiffusion en Afrique aujourd'hui ? Pourquoi pas une transition vers la 5G pour améliorer les conditions de diffusion ? Très peu de pays africains sont en train d'assurer cette transition. Pensez-vous que le rêve est permis ou allons-nous rester indéfiniment dans un système de diffusion qui grève les budgets en Afrique ?
Il faut faire la distinction entre la 5G mobile et la 5G broadcast. La 5G broadcast n'est pas encore homologuée ; des tests sont en cours chez plusieurs fabricants d'émetteurs.
L'avenir de la télédiffusion et de la diffusion de contenu individuel repose sur des plateformes interconnectées et interopérables. Cela signifie qu'on pourra accéder à un contenu sur n'importe quel support, classique ou moderne, l'adapter à nos réseaux et le diffuser via des stations de technologie d'émission.
Concernant la 5G mobile, elle a d'ailleurs déjà accaparé une part importante du spectre des télédiffuseurs. Ce n'est pas nécessairement néfaste, car la 5G mobile vise à concrétiser le rêve d'une télévision mobile. Le télédiffuseur diffusera en 5G avec une interactivité. Dans un futur proche, il y aura des récepteurs 5G broadcast.
C'est la mission du télédiffuseur : assurer une diffusion 5G broadcast. Le retour, le "feedback", sera assuré par les BTS des services mobiles. C'est un télédiffuseur intelligent : il déploie la 5G broadcast et des plateformes qui exploiteront gratuitement le support des opérateurs mobiles pour véhiculer des données VOD, des informations météorologiques, l'interactivité et les statistiques.
Il n'y a donc pas de guerre ouverte ou cachée concernant la bande passante ou la fréquence. Au contraire, le télédiffuseur est le grand gagnant, car les IMT investissent massivement dans la fibre optique et internet. Nous venons nous greffer gratuitement sur ce support pour assurer nos services. Un télédiffuseur étatique, par exemple, détient l'exclusivité de la diffusion de contenu audiovisuel. Il sera l'opérateur le plus prospère du pays, plus que les opérateurs mobiles.
Entretien réalisée par
Gisèle Nnemi NGA
Irene GAOUDA
Hicham ATTMANE, à Abidjan
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